Une analyse des récits culturels de la capoeira constate : son origine n’est pas brésilienne.
A travers l’histoire de vie de l’un de ses plus grands noms et grâce à des entrevues avec d’autres maîtres de Rio et de Salvador, ce travail cherche à établir un dialogue entre l’ancestral et le moderne présents dans la capoeira angola.
Rafael Veríssimo
Les contradictions entre le moderne et le traditionnel, présents dans l’histoire de la vie d’un maître de capoeira, forment le thème central de l’étude réalisée à la Faculté de Philosophie, Lettres et Sciences Humaines de l’Université de São Paulo (USP). Dans sa thèse de Doctorat, Maurício Barros de Castro, chercheur au Centre d’Etudes de l’Histoire Oral, propose un dialogue entre l’expérience du maître bahianais João Grande, un des plus anciens de la capoeira angola, avec d’autres récits de la tradition capoeiriste.
João Oliveira dos Santos, né à Itaji, à l’intérieur de Bahia, a été baptisé et a ensuite reçu le titre de maître João Grande par maître Pastinha, l’illustre représentant de la capoeira angola au Brésil. Après avoir longtemps enseigné son art à Salvador, ce disciple de Pastinha traversa des difficultés et en arriva à abandonner la pratique de la capoeira, jusqu’à la visite, en 1981, d’un de ses disciples - maître Moraes – alors qu’il travaillait dans une station service.
Après avoir reçu de l’aide, maître João Grande dédia de nouveau entièrement sa vie à la capoeira et, en 1991, il fut invité à participer au Festival des Arts Noirs d’Atlanta, aux USA, et alla ensuite à New York où il établit résidence et fonda son académie, le Capoeira Angola Center.
En obtenant la reconnaissance grâce à son art, maître João Grande reçut le titre de Docteur Honoris Causa par l’Université d’Upsala, New Jersey, en plus d’une décoration de la part du gouverneur nord-américain pour son travail de développement de la culture traditionnelle et folklorique dans ce pays. Des noms sacrés comme B.B King et John Lee Hooker ont déjà aussi reçu cet hommage.
Le fil conducteur de la recherche est l’histoire contradictoire de João Grande, car c’est dans une ville comme New York, qui représente la modernité, que le maître a réussi à maintenir sa tradition liée à l’ancestralité culturelle africaine, alors qu’au Brésil, ou le sport se développa le plus, le bahianais d’Itaji ne trouve plus d’espace pour son art.
Corps Africain
Ce travail utilise aussi comme matrice une série d’entrevues avec des maîtres capoeiristes de Rio de Janeiro et de Salvador, desquelles il a été conclu que « les références culturelles sur lesquelles se base la capoeira de type angola viennent directement d’une ancestralité africaine, et nom d’une idée de métissage ou d’art martial brésilien », comme l’affirme Barros.
Il explique que le dialogue établit par la capoeira angola est avec un « corps africain ». La matrice corporelle vient de l’observation de mouvements d’animaux de la faune de ce continent – principalement le zèbre ». De cette observation à surgi la danse du n’golo, un rituel d’accouplement de la région de l’Angola et du Congo, dans lequel les jeunes se disputent les jeunes filles non seulement en dansant, mais aussi en se donnant des coups, avec le tête ou en réalisant des ruades.
En 1937, Getúlio Vargas décriminalisa la capoeira en vue de son projet politique nationaliste, et, en 1953, il affirma : « la capoeira est l’unique sport authentiquement nacional. ». Cette formulation, questionnée par les maîtres angoleiros, est soutenue par des suivants de l’autre branche de la capoeira, la régionale.
Etant aujourd’hui la plus diffusée au Brésil, la capoeira regional a été créée par maître Bimba aux alentours de 1930, et ayant pour base l’angola. Elle se différencie principalement par le fait qu’il s’agisse, depuis sa création, d’un art martial (Bimba a toujours défendu cette finalité), alors que l’angola assume un aspect plus ludique, qui n’abandonne pas la lutte, mais n’en fait pas son objectif principal.
« Beaucoup argumentent que la capoeira est un sport brésilien par le fait que la capoeira angola n’existe pas en Afrique. Mais en analysant les danses martiales le long de l ‘Atlantique Noir, nous observons des formes d’expressions très similaires à la capoeira, comme la Ladia en Martinique, ou le Mani à Cuba, ce qui dénote un passé commun », affirme Castro. Le chercheur se sert aussi d’un récit de maître João Grande, publié dans une revue spécialisée, dans lequel il affirme avoir vu, lors de son passage en Afrique, des mouvements et des coups aux caractéristiques similaires à ceux de la capoeira en général .
Source : Agencia USP de Noticia 10/11/04 http://www.usp.br/agen/repgs/2004/pags/222.htm)
Traduction : Marreco