Les mots de Mestre Gato Preto dans l'interview accordée pour la "Revista Capoeira N°04, ano II"
Quel était le profil du capoeiriste à cette époque?
Le capoeiriste était un travailleur. Un conducteur, qui transportait la canne; un arrimeur sur les quais du port; un maçon; un charpentier; un electricien; un négociant itinérant; un marin, finalement, il était toujours un travailleur qui, indépendamment de sa condition professionnelle, jouait par amour, comme un loisir, une espèce de thérapie. Le capoeiriste faisait cela car c'était une danse, qui le faisait se sentir bien et réussir ce qu'il voulait, à travers la concentration.
Personne ne parlait d'argent? personne ne vivait de la capoeira?
L'argent vint ensuite, avec des jeux faits dans la roda. Quelqu'un demandait au capoeiriste d'attraper avec la bouche une billet, placé sur le sol au milieu de la roda, posé sur un foulard rouge.
Les 2 partenaires jouaient jusqu'à ce que l'un deux soit immobilisé par un coup de pied -pas avec la main- et l'autre attrapait le billet. Il fallait veiller à ce que l'adversaire soit immobilisé pour ne pas courir le risque de se prendre un coup de pied au visage. Après tout cela, ils s'embrassaient et l'argent était placé au pied du berimbau pour payer une tournée de bière, de rafraichissement ou d'eau-de-vie après la roda. Seulement dans ce cas-là l'argent était présent.
Vous vous référez à un temps où tous étaient amis, il y avait une union. Aujourd'hui il y a beaucop de rivalités. Le capoeiriste grand et fort entre dans la roda disposé à détruire l'autre. Que pensez-vous de cela?
En ce temps-là, les Mestres se respectaient entre eux et encourageaient ce respect chez leur élèves. Ils pouvaient être énormes, comme Agulhão, qui mesurait deux mètres de haut, ou forts comme Mestre Waldemar, Traira, Zacarías, Davi ou Dada - qui à l'époque, donnaient le meilleur show de capoeira - mais il y avait un contrôle, un respect. Celui qui se prenait une cabeçada, tombait et se relevait pour serrer les mains de son partenaire, sans aggressivité ni rancoeur.
Aujourd'hui je vois beaucoup de personnes enseignant à se battre, voulant être les meilleurs et diffusant le message aux malchanceux, qui n'ont pas d'information, que c'est çà le plus important. Ce sont des personnes qui ne voient que le côté destruction. Les Mestres se rendent coupables des conséquences et la capoeira se trouve dans une position dans laquelle elle ne peut montrer son potentiel.
Cela se passe-t-il aussi comme çà chez les anciens Mestres?
Non. Les seuls Mestres qui discutaient de çà à Salvador, à cette époque, étaient Canjiquinha et Caiçara. Mais il s'agissait de mises en scènes, de représentations pour les touristes. Les deux moururent en hommes de bien.
Bimba avait son académie au Maciel de Cima, et Pastinha, au Largo do Pelourinho. Très proches. Ils ne se rendaient pas visites mais ne disaient jamais rien de mal de l'académie de l'autre.
J'ai avec moi des reportages de journal de 1984 sur João Pequeno et João Grande, à Itapuan. Il faut voir comme ils s'apprécient et se respectent!
Caiçara et Canjiquinha furement mes amis jusqu'à la fin de leur vie. les élèves de Bimba maintiennent leur amitié avec moi depuis 45 ans. Je n'ai pas d'ennemis dans la capoeira, et si j'en avais, ce ne serait pas contre moi, mais contre l'art.
Mestre Gato Preto
traduction: Marreco
interview originale sur:
http://www.euresis.info/angoleiros/forum/topic.asp?TOPIC_ID=103
_________________